13/11/08 – Synthèse sur la pêche au bar

By | 13 novembre 2008
Le bar commun ou loup (Dicentrarchus labrax – Linné 1758) est l’un des poissons emblématiques de nos côtes françaises. Du fait de sa forte valeur marchande et culinaire, il est un poisson des plus convoités tant par les pêcheurs récréatifs que professionnels.
 
Qu’en est-il de l’état de ses ressources ?
Est-ce qu’une exploitation durable doit être envisagée pour préserver leur maintien ?
 
Dans cet article, Philippe Gautier vous propose de faire le tour de la question et vous expose les positions de la FCSMP sur le sujet.

 

Présentation générale

Le bar commun (Dicentrarchus labrax – Linné 1758) est l’un des poissons emblématiques de nos côtes françaises. En Méditerranée, il porte le nom de « loup ». Sa croissance est différente selon les régions et selon les sexes. Ainsi, à l’âge de 5 ans, la taille moyenne des femelles est de 54 cm en Méditerranée et 40 cm sur les côtes bretonnes, tandis que la taille moyenne des mâles est de 48 cm en Méditerranée et 39 cm sur les côtes bretonnes.

Le bar est un poisson eurytherme et euryhalin, c’est-à-dire capable de supporter de grands écarts de température (de 2°C à 32°C) et de grandes variations de salinité (de 0,5 ‰ à 40 ‰). Il est possible de le rencontrer à peu près n’importe où : dans les estuaires, dans les baies, près des pointes rocheuses ou en pleine mer. Tous les hivers, les bars convergent habituellement vers des zones de frayères où ils se rassemblent en énormes concentrations pour se reproduire. Le reste de l’année, ils fréquentent les zones nourricières au bord des côtes.

 

Un poisson convoité par tous

Du fait de sa forte valeur marchande (le bar se classe à la troisième place en valeur des espèces commerciales en France), le bar est traditionnellement ciblé par certains pêcheurs professionnels côtiers (fileyeurs, palangriers et ligneurs). Les chalutiers s’intéressent de façon saisonnière à cette espèce qu’ils capturent lors des grands regroupements sur les frayères. Enfin, pour de nombreux pêcheurs récréatifs, le bar est considéré comme le poisson roi en raison de son statut de prédateur, de sa combativité et de la qualité de sa chair.

Une étude Ifremer réalisée en 2005 démontre un volume de prises comparable entre les pêcheurs professionnels et les pêcheurs récréatifs. Néanmoins, ces chiffres sont sujets à discussion en raison d’une grande incertitude sur la fiabilité des données recueillies ou estimées.

 

La pêche professionnelle

Les tonnages de débarquement ont fortement augmenté sur les 10 dernières années (surtout en Manche) et atteignent aujourd’hui environ 5 000 tonnes. La production du golfe de Gascogne est restée stable depuis 1986. Bien qu’elle soit toujours supérieure à celle de la Manche, les tonnages provenant des deux bassins sont actuellement du même ordre de grandeur.

Parmi tous les engins mis en oeuvre pour cibler le bar, certains sont utilisés plutôt en période hivernale (chaluts et filets), et d’autres plutôt en période estivale (lignes et palangres). Leur efficacité est très variable : celle des chaluts est très largement supérieure à celle des filets, qui est elle-même supérieure à celle des lignes et palangres. Les tonnages débarqués se répartissent environ ainsi : chalutiers (55%), fileyeurs (25%), ligneurs (15%).

Toutes les catégories jouent un rôle important car chaque type d‘engin est mis en oeuvre dans des zones et à des périodes de l’année différentes, ce qui implique un ciblage du bar permanent dans le temps et dans l’espace.
 

La pêche récréative

D’après l’enquête Ifremer de 2005, le nombre de pêcheurs récréatifs pêchant le bar est estimé à environ 900 000 personnes qui pratiquent cette activité essentiellement durant la période estivale. 50% des pêcheurs effectuent 5 sorties ou moins dans l’année, la moyenne se situant à 13 sorties.

Le total annuel des captures de bars s’élèverait entre 4 000 & 5 000 tonnes, réparties équitablement entre les trois façades littorales de la Manche, de l’Atlantique et de la Méditerranée. Les engins de capture utilisés sont la canne ou ligne (82 %) l’arbalète (9 %), le filet (7%) et la palangre (2%). La répartition en tonnage entre les différentes activités n’est pas connue.
Cependant, l’Ifremer reconnaît que tous ces chiffres sont à considérer avec prudence et demandent à être affinés par le biais d’enquêtes de terrains complémentaires qui permettraient de mieux détailler les pratiques des différentes catégories de pêcheurs récréatifs.

 

Etat de la ressource

Dans son dernier avis publié en 2004, le Conseil international pour l’exploration de la mer (CIEM) note que les stocks de bar de Manche, mer du Nord, côtes anglaises et golfe de Gascogne sont exploités à un niveau proche du rendement maximal par recrue, et à une taille moyenne de capture un peu faible, ce qui n’altère cependant pas la capacité de reproduction.

Le CIEM souligne aussi que le réchauffement des eaux en Manche et en mer du Nord crée depuis 1989 des conditions environnementales favorables à la croissance et au recrutement du bar. Dans ce même avis, le CIEM constate un probable accroissement de la mortalité due à la pêche, qui ne met pas encore la ressource en péril, et une expansion du stock, tant en taille et qu’en surface, due à des changements environnementaux. Les stocks sont donc considérés comme bons (la ressource bar n’est pas en danger) mais l’équilibre pourrait basculer rapidement si la pression de pêche augmentait d’une façon ou d’une autre.

Fin 2008, les ligneurs de Bretagne ont alerté d’une baisse très significative des prises de bars en 2008. La situation serait analogue en Manche et dans le golfe de Gascogne. Ils réclament aux scientifiques la mise en oeuvre d’une évaluation du stock « digne de ce nom » et que soient identifiés l’ensemble des paramètres affectant ce stock.

 

Pour une exploitation durable

Actuellement, il n’y a pas de réglementation européenne sous forme de limitation des prises de bar (pas de TAC, ni de quotas). Il existe cependant une taille minimale de capture fixée à 36 cm en Manche/Atlantique et 25 cm en Méditerranée. En France, les apports sont limités à 5 tonnes hebdomadaires par navire (arrêté du 16 janvier 2006).

Selon l’Ifremer, la limitation de l’effort de pêche ne peut être garantie sans moyen de contingentement efficace et contrôlé. Il est possible que dans les années à venir, le nombre de chalutiers ciblant le bar augmente compte tenu de la situation de la pêcherie d’anchois. L’interdiction totale de la pêche pendant le frai est une option de gestion de l’accès qui revient à interdire la pêche au bar à ces flottilles. À l’opposé, l’ouverture totale et sans restriction d’accès ne permet ni d’ajuster les capacités de capture à la production naturelle de la ressource, ni d’assurer le partage de la ressource entre usagers.

Les mesures de régulation pour une pêche durable du bar pourraient avoir pour objectif la répartition de la ressource entre les différents pêcheurs, y compris les pêcheurs plaisanciers. Par ailleurs, un groupe de travail du CIEM note le besoin de mieux connaître l’activité et les prélèvements de la pêche plaisancière compte tenu de son poids présupposé dans le prélèvement des bars : c’est même la catégorie qui aurait le plus gros impact. Une analyse des pratiques des différentes catégories de pêcheurs récréatifs permettrait de mieux cerner leurs effets sur la ressource.

Du côté des pêcheurs récréatifs, les pêcheurs à la ligne déclarent être favorables à l’application d’une maille « biologique » de 42 cm, pour être certains que les femelles se sont reproduites au moins une fois. L’idée d’un repos biologique pendant l’hiver est aussi évoquée. Globalement, les pêcheurs de loisir en mer interrogés dans l’enquête Ifremer apparaissent très largement favorables à la mise en place de périodes de repos biologiques (90%), à la limitation des prises par sortie (84%) et à un renforcement des contrôles (82%). Par contre, ils sont plus partagés quant à la mise en place d’un permis, que ce soit pour protéger uniquement certaines espèces (59%) ou pour protéger toutes les espèces (41%).

La connaissance de l’évolution des pêcheries montre que c’est lorsque l’état du stock est satisfaisant qu’il faut mettre en place de mesures de gestion et de contrôle de leur efficacité. Quand sa situation est trop dégradée, il devient en effet extrêmement difficile de rétablir une situation biologiquement saine et économiquement viable. Les exemples de la morue en mer du Nord et du thon rouge en méditerranée sont riches d’enseignements.
 

Position de la FCSMP

Consciente de la fragilité de la ressource « bar », la FCSMP est convaincue des nécessaires mesures de gestion à appliquer dès à présent pour garantir sa pérennité à terme. Pour cela, elle invite tous les pêcheurs sous-marins à respecter les préconisations suivantes :

 

1. Maille biologique

Respect de la maille biologique de 42 cm afin de laisser le temps au bar de se reproduire.

 

2. Période de frai

Constatant une dégradation sensible des prises en Manche et Atlantique, la FCSMP recommande aux pêcheurs sous-marins de ne pas prélever de bars sur ces deux façades durant cette période.

Concernant la Méditerranée où la ressource semble plus stable, le pêcheur sous-marin se doit d’être hyper sélectif en période de frai et limiter le dérangement des compagnes.

 

3. Nombres de prises

Le pêcheur sous-marin responsable prélève toujours dans le respect et jamais dans l’excès les poissons destinés à sa consommation familiale.

 

4. Impact et environnement

Afin de mieux évaluer l’impact de notre pratique et contribuer à la gestion de la ressource, la FCSMP encourage tous les pêcheurs sous-marins à participer aux études institutionnelles et à remplir un carnet de prélèvement en ligne sur le site www.fcsmpassion.com.

La FCSMP invite les pêcheurs sous-marins à rejoindre les structures gestionnaires des parcs marins et des zones Natura 2000 afin de participer localement aux travaux de réflexion et à la gestion des ressources.

Il va sans dire que pour être efficaces, de telles mesures n’auront d’impact réel que si elles s’appliquent à l’ensemble des pêcheurs récréatifs et si la pêche professionnelle adopte des mesures de gestion raisonnées.

 

Sources bibliographiques

Thèse « Traits biologiques et exploitation du bar commun dicentrarchus labrax (l.) dans les pêcheries françaises de la Manche et du golfe de Gascogne » (novembre 2005)
http://www.ifremer.fr/docelec/notice/2005/notice1088.htm

Avis émanant de la CE sur l’état du bar dans les eaux européennes (mai 2002)
http://www.ifremer.fr/francais/produits/poisson/bar/acfm_bar.htm

Communiqué Ifremer  « Zoom sur le bar, une espèce convoitée »  (avril 2006)
http://www.ifremer.fr/com/communiques/11-04-06-bar.htm

Site Web Collectif bar européen « Connaissance de la mer : le bar »
http://www.sosbar.org/

Enquête relative à la pêche de loisir (récréative et sportive) en mer en Métropole et dans les DOM avec l’institut BVA (octobre 2007)
http://agriculture.gouv.fr/sections/magazine/dossiers/littoral-peche-loisir/ifremer-se-penche-sur/downloadFile/FichierAttache_1_f0/Synthese_peche_de_loisir_091007-1.pdf?nocache=1195576858.8
http://peche.ffessm.fr/Environnement/Rapport_Enquete_peche_bar_2005.pdf

Etude IFREMER « Point sur les travaux de recherche : Pêches récréatives et sportives en mer »
http://www.ifremer.fr/sth/docs/Ifremer_Peche_Recreative.pdf

OFIMER : les chiffres clés de la filière pêche et aquaculture – édition 2008 (version française)
http://www.ofimer.fr/99_up99load/2_actudoc/1723d1_01.pdf

Ligneurs de Bretagne : Coup de colère de décembre 2008
http://www.pointe-de-bretagne.fr/infos-actus.php?i=13

 

Partagez l'information :
Category: Non classé

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.